Honda Ridgeline 2006

HONDA RIDGELINE

Inattendu et inespéré

Quand Honda a décidé de se mêler de pick-up, il n’était pas question pour ses ingénieurs de faire les choses à l’ancienne en concevant une camionnette similaire à ce qui existait déjà. Le plagiat et l’imitation, ils laissent ça aux autres. Ils ont donc fait table rase des préceptes et des dogmes qui dictent la configuration mécanique de ce type de camion – une recette qui a d’ailleurs très peu changé en cinquante ans.

Il est difficile de situer la nouvelle camionnette Ridgeline, tellement elle innove par rapport aux produits auxquels elle compte maintenant se mesurer. Une chose est certaine cependant : avec toutes les nouveautés qu’amène le Ridgeline, la barre vient d’être rehaussée de plusieurs crans pour ses concurrentes. Mais justement, qui sont donc ses rivales directes ? Bien malin qui peut le dire puisque le Ridgeline risque de bouleverser les habitudes d’achat de nombreux conducteurs de camionnettes. Il est impossible de le situer dans un segment précis du marché, car, même s’il n’est guère plus gros qu’un Nissan Frontier, le Ridgeline offre pratiquement autant d’espace intérieur qu’un Chevy Avalanche un Ford F-150 Supercrew, en proposant des places confortables pour cinq adultes. De plus, malgré sa faible cylindrée, son moteur offre autant de puissance et de couple que ceux que l’on retrouve dans les moyennes et grandes camionnettes ayant une capacité de charge d’une demi-tonne.

CARROSSERIE

Même si cela paraîtra parfaitement hérétique aux oreilles d’un amateur de pick-up, le moteur du Ridgeline est monté de façon transversale. Cela lui permet de donner plus de place à ses passagers, avec un habitacle plus long et un capot plus court. L’autre atout majeur du Ridgeline est sa caisse arrière novatrice : construite en matériaux composites, son fond peut s’ouvrir, révélant un immense coffre verrouillable de 241 litres. Ce coffre étanche permet de loger des outils, des bagages, ou des sacs de golf, à l’abri des regards indiscrets et des intempéries. Le panneau de caisse, quant à lui, peut se rabattre normalement vers le bas, comme dans toute camionnette, mais il peut aussi s’ouvrir latéralement, en pivotant à l’aide d’un système de penture breveté. Cela permet d’avoir accès au contenu du coffre sans avoir à grimper sur le panneau de caisse. Notez, de plus, qu’il est possible d’empiler des feuilles de contreplaqué entre les passages de roues du Ridgeline, comme dans la caisse d’une camionnette pleine grandeur. Il est seulement déplorable que les designers de Honda n’aient pas eu la main plus heureuse quand est venu le temps de dessiner la robe du Ridgeline, car elle ne rend pas justice à son contenu innovateur.

HABITACLE

C’est à l’intérieur de l’habitacle que le Ridgeline est le plus conventionnel. C’est vaste et confortable, il y a de la place pour cinq adultes et la visibilité est excellente. Si vous vous demandiez pourquoi le panneau de caisse semble trop bas par rapport aux flancs de la caisse, c’est justement pour favoriser la visibilité vers l’arrière. Il faut aussi noter l’immense espace de rangement sous le siège arrière. La planche de bord essaie très fort d’être originale, mais le résultat est plutôt ordinaire. Honda sait faire mieux en termes d’ergonomie. Par contre, la sécurité est au rendez-vous, puisque le Ridgeline est le premier camion à se voir octroyer une cote de cinq étoiles par le NHTSA aux États-Unis, pour ses essais de collision.

MÉCANIQUE

Le seul groupe motopropulseur offert sur le Ridgeline, composé d’un V6 de 3,5 litres et d’une boîte automatique à 5 rapports, est dérivé de celui qui équipe les Honda Pilot et Acura MDX. Il a cependant subi de nombreuses modifications pour encaisser les abus auxquels sont fréquemment soumises les camionnettes. Le V6, qui développe une puissance de 255 chevaux et un couple de 252 livres-pied, offre des performances comparables à celles des V8 des camionnettes rivales.

La révolution consistait ici à implanter transversalement le moteur et à utiliser un système à rouage intégral qui donne la priorité aux roues avant motrices. Oui, vous avez bien lu : à moins que vous n’ayez enclenché le mode de remorquage ou celui qui bloque le boîtier de transfert, ou que les conditions de la route le dictent au système de gestion de la traction, ce sont les roues avant qui se chargent de la majorité du travail. Les traditionalistes trouveront qu’il s’agit là d’un véritable sacrilège, mais dans le feu de l’action cela fonctionne très bien. J’ai eu l’occasion d’essayer le Ridgeline sur un parcours hors route assez difficile et de tracter une remorque de 5 000 livres (2260 kilos); dans les deux cas, la motricité était là où il le fallait, lorsqu’on en avait besoin.

COMPORTEMENT

Pour obtenir une tenue de route précise et donner de la robustesse au Ridgeline, les ingénieurs de Honda ont voulu concevoir la carrosserie la plus rigide possible. Pour ce faire, ils ont mis au point une autre innovation qui défie les conventions : ils ont créé un réseau de profilés à sections rectangulaires, soudés à même le plancher de la carrosserie monocoque. En intégrant ainsi un châssis en échelle solidaire de la coque du camion, ils ont réussi, sans trop ajouter de poids, à obtenir une double structure. C’est un peu comme porter une ceinture et des bretelles ! Avec cette structure très rigide, la tenue de route est une des forces du Ridgeline, d’autant plus que Honda s’est refusé à employer un essieu arrière rigide, comme cela se fait sur tous les pick-ups. Ainsi, Honda a conçu une suspension arrière indépendante spécifiquement adaptée au Ridgeline, qui permet une plus grande douceur de roulement tout en éliminant les sautillements inhérents à ce type de véhicule. De plus, cette suspension confronte la logique populaire voulant qu’il soit préférable d’avoir un essieu rigide pour tracter une remorque. Dans toutes les situations, le Ridgeline se conduit avec l’aisance d’une voiture. Le freinage est puissant, mais les accélérations manquent un peu de vigueur. Toutefois, la consommation de carburant est très raisonnable, comme au pouvait s’y attendre d’un véhicule Honda.

CONCLUSION

Le monde des pick-ups ne sera plus jamais le même, car, malgré sa silhouette peu engageante, le Ridgeline risque de bouleverser les habitudes d’achat des acheteurs de camionnettes et d’utilitaires sport. Les autres constructeurs doivent maintenant se poser la question suivante : « doit-on continuer de prendre les acheteurs de camionnettes pour des demeurés, en produisant des véhicules à la conception préhistorique, sous prétexte que ces gens sont habituellement conservateurs et plutôt réfractaires au changement ? » Honda a fait le pari inverse en créant une camionnette avant-gardiste, qui bouscule toutes les conventions établies.

FORCES

Coffre dans la caisse

Habitacle généreux

Tenue de route impressionnante

Consommation raisonnable

Concept révolutionnaire

FAIBLESSES

Design ésotérique

Accélérations qui manquent un peu de vigueur

Trop avant-gardiste pour certains ?!