Jeep

On dit souvent que la nécessité est la mère de toutes les inventions. C’est dans ce contexte qu’est née la légende Jeep. En 1940, avec la Seconde Guerre mondiale qui fait rage en Europe alors qu’il devenait évident que les États-Unis allaient se mêler au conflit, l’Armée américaine se devait de remplacer les modèles T qu’elle utilisait pour un véhicule plus moderne. On lance donc un appel d’offres à 135 entreprises avec un cahier de charge spécifique. On veut un véhicule compact, léger, rectangulaire avec des sièges baquets qui offre 600 livres de capacités de chargement 4 roues motrices, une boîte de transfert et capable de rouler à 80 km/h. En plus de tous ces critères spécifiques, l’Armée fixe un délai quasi impossible à rencontrer en demandant un prototype fonctionnel en 49 jours.

Seulement 2 compagnies répondent à l’appel :

American Bantam Car Company et Willys-Overland furent les deux seules entreprises à livrer un véhicule dans les délais. Même si aucun des deux véhicules ne répondait à tous les critères, celui de Bantam baptisé BRC ou Bantam Reconnaissance Car était celui qui se rapprochaient le plus des critères exigés par l’armée américaine. Toutefois, l’Armée de terre estime que la compagnie Bantam est trop petite pour fournir le très grand nombre de véhicules requis. Elle passe donc le design de Bantam à Willys et à Ford et les encourages à modifier le design. Les prototypes Ford « Pygmy » et Willys « Quad » sont le résultat des modifications sur le modèle original de Bantam. Mille cinq cents exemplaires de chaque version (Bantam BRC-40, Ford GP et Willys MA) ont été construits et soumis à de nombreux essais sur le terrain. À la fin des tests, le poids de fonctionnement des Jeep est revu à la hausse.  Delmar « Barney » Roos, ingénieur en chef de Willys-Overland, ajoute à ce moment-là le moteur « Go Devil », plus gros et plus puissant, et remporte le contrat de production initiale. La version Willys est devenue la conception autorisée de Jeep pour l’Armée américaine. Comme le département de la guerre des États-Unis avait besoin d’un grand nombre de véhicules en peu de temps, Willys-Overland accorda au gouvernement des États-Unis une licence non exclusive autorisant une autre société à fabriquer des véhicules conformes aux spécifications de Willys. L’Armée de terre a choisi Ford comme second fournisseur, construisant des Jeeps au design de Willys. Willys a fourni à Ford un jeu complet de plans et devis. American Bantam, créateur de la première Jeep, en a construit environ 2 700 et a consacré le reste de la guerre à la construction de remorques pour l’armée.

Un succès retentissant

Ce petit camion qui peut pratiquement tout faire arrive à point nommé durant la guerre. À cette époque, l’Armée nazie commençait à remporter des victoires en Europe et en Afrique du Nord. Le besoin des Alliés pour un véhicule tout terrain devenait pressant. Le général Dwight D. Eisenhower a déclaré que l’Amérique n’aurait pas pu gagner la Seconde Guerre mondiale sans le Jeep.  Ford et Willys auront produit environ 640 000 Jeep durant la Seconde Guerre mondiale, près de 20 % de tous les véhicules militaires dans le conflit. Et pour ceux qui sont curieux de savoir le prix, Willys vendait son modèle 650 $ (US) alors que Ford le vendait 780 $.

L’origine du nom

L’origine du nom Jeep n’est pas entièrement établie. Certains affirment qu’il s’agit d’une déformation de l’abréviation GP (General Purpose, le nom du modèle développé par Ford). D’autres croient plutôt que le nom Jeep provient d’un personnage, «Eugene the Jeep» dans le dessin animé Popeye. Après la guerre, les Jeeps sont devenus encore plus célèbres, car ils sont devenus disponibles sur le marché des surplus militaires. Certaines annonces prétendaient offrir « des Jeeps livrés directement de l’usine ». Cette légende a perduré pendant des décennies, malgré le fait que les Jeeps n’étaient jamais expédiées de l’usine. Mais beaucoup de militaires de retour de la guerre et des amateurs de hors route en ont fait l’acquisition. Dès la fin de 1943, Willys dépose le nom Jeep (la compagnie avait aussi pensé à AgriJeep) dans le but de poursuivre sa production et d’en faire un véhicule utilitaire pour l’agriculture. Cette demande a rencontré à ses débuts une forte opposition de Bantam et Minneapolis-Moline qui revendiquait la paternité du nom Jeep. Willys fait fit de cette opposition et continue de fabriquer des Jeep à utilisation civile à partir de 1945 avec la gamme CJ (Civilian Jeep). Comme aucune des entreprises qui contestaient Willys pour le nom Jeep ne produisait de véhicules, Willys-Overland obtint finalement le nom de « Jeep » en tant que marque déposée en juin 1950.

Une suite de modèles et des changements de propriétaires

Nous le disions, dès la fin de la Seconde Guerre mondiale Willys se concentre sur la fabrication de Jeep en oubliant les voitures. Il y eut le Jeep familial en 1946, le Jeep Truck en 1947 et le Jeepster en 1948. Willys tenta sans succès de revenir dans la vente de voitures en 1952 avec la berline Willys aero. Cette aventure prit fin l’année suivante avec l’acquisition de la société Willys par Kaiser Motors en 1953 pour 60 millions de dollars. Kaiser a initialement appelé la société fusionnée « Willys Motors », mais l’a rebaptisée Kaiser-Jeep en 1963. L’aventure ne dura pas très longtemps. Dès 1970, American Motors Corporation (AMC) rachète à son tour les activités de Jeep de Kaiser. Cette fois, 70 millions de dollars ont changé de mains. La vente de véhicules Jeep ne suffisait pas à rendre une entreprise profitable. AMC offrait la vente de modèles Jeep comme complément à ses voitures. Elle offre les modèles Jeep aux marchés internationaux, aux gouvernements et en 1971 transforme Jeep en une filiale distincte baptisée AM General, celle qui développera plus tard le célèbre Hummer.

Succès planétaires

En 1976, les ventes globales de Jeep dépassent pour la première fois les 100 000 unités dans le monde. Ce succès hors du territoire nord-américain suscite de l’intérêt et dès 1979, le constructeur français Renault commence à investir dans AMC. Au cours de cette période, Jeep a présenté le XJ Cherokee, son premier VUS à châssis monocoque. Le succès a propulsé les ventes mondiales à plus de 200 000 unités pour la première fois en 1985. Toutefois, la récession des années 80 a été difficile pour bien des constructeurs, Renault a connu des problèmes financiers tout comme AMC qui avait peine à vendre ses voitures. En 1987, la Chrysler Corporation rachète AMC et la marque Jeep tout juste après le renouvellement de la CJ-7. Chrysler qui voulait d’abord et avant tout ajouter le nom Jeep à sa gamme de produit laissa tomber tous les autres modèles d’AMC. Un bond d’un peu plus de dix ans en avant qui mène à la fusion de Daimler et Chrysler en 1998. Jeep est maintenant dans la grande famille DaimlerChrysler. Un mariage qui ne fit pas de vieux os. En 2007, c’est le divorce dans la douleur des deux marques. DaimlerChrysler a finalement cédé la majeure partie de sa participation dans Chrysler à une société de capital-investissement. Chrysler a passé par la faillite en 2008 avant de devenir la propriété de Fiat. Chrysler et la division Jeep étaient exploités sous le nom Chrysler Group LLC jusqu’au 15 décembre 2014, date à laquelle Chrysler a été absorbée par Fiat Chrysler Automobiles qui détient aujourd’hui la marque Jeep.

Une tradition qui perdure

Jeep est aujourd’hui un des cinq noms de compagnie la plus reconnue dans le monde avec Coke, Google, Microsoft et Nike pour en nommer quelques-uns. Tout le monde sur la planète sait ce qu’est un Jeep. Les véhicules ont été construits sous licence par divers constructeurs dans le monde, notamment Mahindra en Inde, EBRO en Espagne et plusieurs autres en Amérique du Sud. Mitsubishi a construit plus de 30 modèles au Japon entre 1953 et 1998, la plupart étaient basées sur le modèle CJ-3B du design original de Willys-Kaiser. American Motors a créé la première entreprise commune de fabrication automobile en République populaire de Chine le 15 janvier 1984. La Beijing Jeep Corporation, Ltd., en partenariat avec Beijing Automobile Industry Corporation, pour produire le Jeep Cherokee (XJ) à Beijing.

Encore aujourd’hui, le Jeep Wrangler et le Jeep Cherokee sont construits dans la ville, de Toledo, en Ohio, non loin du site de l’usine originale de Willys-Overland. Même si le Jeep d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec le petit Willys d’autrefois, les caractéristiques qui ont fait la renommée du modèle sont toujours là. Les 4 roues motrices de série, des boîtes de transferts évoluées qui vous amèneront n’importe où. Le Wrangler est encore parmi les véhicules sur le marché qui garde la meilleure de revente et est toujours de tous les véhicules celui qui exprime le mieux la liberté derrière le volant.