Un millier d’Alpine envahissent Dieppe pour célébrer le 100e anniversaire de Jean Rédélé

Plus de 1 000 Alpine anciennes et modernes ont envahi Dieppe en Normandie, le berceau de la marque, durant la fin de semaine. Leurs propriétaires s’y réunissaient pour célébrer le 100e anniversaire de naissance de Jean Rédélé, le fondateur de cette marque.

Cette initiative du collectif IDÉA (Initiative Dieppe Événements Alpine) a naturellement été réalisée avec la collaboration d’Alpine, une marque ressuscitée par Renault en 2012. Car il faut se rappeler qu’en 1995, le constructeur français l’avait fait disparaître.

C’est en mars 2012 qu’Alpine est réapparue sur la scène automobile. Au Salon de l’auto de Genève, Renault présente une voiture-concept baptisée Renault Alpine A110-50. Puis, en mai, au Grand Prix de F1 de Monaco, Carlos Taverès, alors directeur général des opérations de Renault, confirme la relance de la marque.

En 2016, au Salon de l’auto de Genève, le prototype Vision annonce l’Alpine du 21e siècle. Ce coupé biplace à moteur central arrière préfigure le nouveau modèle de série qu’on nomme A110 GT. Sa silhouette élégante rappelle beaucoup le modèle du même nom qui a établi la renommée d’Alpine entre 1961 et 1977.

Une fin de semaine de réjouissances

À Dieppe, cette fin de semaine, les passionnés et des badauds qui assistaient à cette grande fête dans la ville normande ne parlaient pas du cafouillage des années 90 et de la disparition d’Alpine. Le rappel d’un passé glorieux de la marque et l’avenir de la marque ont pris le dessus.

Pour amorcer la fête, une parade a mené un long cortège d’Alpine de la Manufacture Alpine Dieppe Jean Rédélé, nouveau nom de l’usine, au front de mer de Dieppe.

À l’arrivée, les participants et les visiteurs ont été conviés au dévoilement de l’Alpine A110 GT J. Rédélé. Basée sur le modèle de série actuel, la J. Rédélé est une variante luxueuse dont seulement 100 exemplaires seront produits. Le constructeur a d’ailleurs profité de l’occasion pour offrir à Michelle Rédélé, conjointe du fondateur d’Alpine décédé en 2007, l’A110 GT J. Rédélé numéro 1. Comme les 99 autres, ce petit bolide biplace de 300 ch à toit noir a une carrosserie Gris Montebello, couleur qu’affectionnait particulièrement Rédélé.

Cette grande fête a été ponctuée, entre autres, d’une projection sur grand écran, le dimanche, de l’épreuve de F1 disputée à Monaco. Une épreuve aux termes de laquelle Fernando Alonso et Esteban Ocon, les pilotes de l’écurie BWT Alpine F1, ont fini respectivement en 7e et 12e place.

Une renaissance liée à des tendances de marché

La renaissance d’Alpine est liée à une analyse de marché aujourd’hui dépassée ! Dès 2006, des rumeurs évoquant le retour de la marque circulaient. Lorsque Renault l’a annoncé formellement, en 2012, c’était pour décrocher une part du créneau des voitures sport. À l’époque, ce créneau lucratif représentait environ 600 000 ventes par année à l’échelle mondiale. Le constructeur lui prêtait alors un potentiel de croissance de l’ordre de 15 % sur trois ans, en Europe du moins.

Cette interprétation des tendances du marché, plusieurs constructeurs la partageaient. Rappelons que c’est à la même époque que les jumelles Subaru BRZ/Toyota GR 86 on vu le jour.

Aujourd’hui, on sait que le marché a largement basculé du côté des utilitaires et autres multisegments, en Amérique du Nord particulièrement, mais aussi en Europe et en Asie. C’est sans compter l’électrification des motorisations qui a pris une ampleur sans précédent.

Les stratèges de Renault en sont visiblement conscients. En février 2022, le constructeur a annoncé la mise en production d’un multisegment sport à motorisation électrique à l’usine dieppoise dès 2025. Ce premier « camion » Alpine est une des trois nouveautés électriques promises d’ici 2026. Les deux autres VÉ sont une voiture compacte et une remplaçante de l’actuelle A110.

Un brin d’histoire

À ses débuts, Jean Rédélé n’imaginait sans doute pas que sa marque produirait un jour des VÉ ! Passionné de sport automobile, concepteur et pilote émérite, c’est en 1955 qu’il fonde Alpine. Un nom inspiré de son terrain de jeu préféré : les Alpes.

Ses premiers coupés sportifs sont conçus sur une base de Renault 4 CV et s’illustrent très tôt en compétition. Forte de ce palmarès, sa marque donnera naissance à une petite variété de sportives et, plus tard, à des voitures dédiées à la compétition.

La berlinette A110 originelle lancée en 1961 est son premier modèle de grand volume. Un rapprochement avec Renault opéré en 1965 y contribuera puisque, dès l’année suivante, les voitures de Rédélé sont vendues et entretenues par les concessionnaires de la marque au losange.

Face au succès et à une demande croissante, l’intégration des deux marques s’opère chaque année d’avantage. En 1969, le site de production actuel de Dieppe, plus grand et mieux équipé, est érigé. Deux ans plus tard, Jean Rédélé présente au Salon de Genève le modèle de série qui deviendra le plus populaire de tous : l’A310. Ce coupé GT, une alternative à la Porsche 911, est une réussite d’équilibre esthétique. En 1973, Renault prend le contrôle de l’entreprise. Puis, en 1978, le fondateur qui se sent de moins en moins en contrôle quitte l’entreprise. L’A610, une descendante de l’A310 produite de 1991 à 1995, est la dernière Alpine produite au cours des 40 premières années de la marque.

En marge des produits Alpine, l’usine de Dieppe fabrique divers modèles spéciaux comme la Renault 5 Alpine, qui a été produite de 1976 à 1984 (56 000 exemplaires de la version atmosphérique et 23 000 exemplaires de la version turbo). La Renault 5 Turbo est aussi produite à Dieppe de 1980 à 1986 (5 112 exemplaires), tout comme la Renault Spider de 1996 à 1999 (1 685 exemplaires) et quelques autres modèles d’exception plus récents comme la Mégane Trophy (13 exemplaires) et la Clio Cup (700 exemplaires).

Une production quasi confidentielle

Au cours des 40 premières années d’existence de la marque, de 1955 à 1995, Alpine a produit 26 666 voitures dans les usines françaises, ses deux modèles les plus vendus étant l’A310 V6, avec 9 276 exemplaires produits de 1976 à 1984, et l’A110, avec 7 579 exemplaires produits de 1961 à 1977.

À partir de 1962, des Alpines sont également assemblées dans quatre autres pays du monde. Willys Overland do Brazil a produit 1 500 A108 renommées Interlagos de 1962 à 1966). FASA-Renault a assemblé 1 900 Alpine en Espagne entre 1963 et 1978. La société mexicaine Dina a, pour sa part, produit 700 Dinalpin au Mexique entre 1964 et 1972. Enfin, 50 Bulgaralpine ont été assemblées en Bulgarie entre 1967 et 1970.

Le sport automobile dans l’ADN de la marque

Alpine et la compétition constitue une histoire en soi, la marque ayant été créée à l’origine pour satisfaire les besoins le passionné de rallye et d’épreuves d’endurance qu’étant Jean Rédélé.

Il faut rappeler aussi qu’au début des années 70, Alpine fait partie de l’élite du rallye mondial. D’ailleurs, en 1971, Alpine monopolise le podium du célèbre Rallye Monte-Carlo avant de récidiver en 1973, année où la marque devient le premier constructeur sacré Champion du Monde des rallyes.

Les victoires d’Alpine en compétition se comptent par centaines. Voici ses succès internationaux les plus marquants :

• Rallye : champion international des marques en 1971; champion du monde des rallyes en 1973; victoires aux Monte-Carlo en 1971 et 1973;
• Endurance : victoire à l’indice de performance des 24 Heures du Mans en 1964 et 1966; champion d’Europe des marques en 1974; victoire aux 24 Heures du Mans en 1978;
• Monoplaces : champion d’Europe de Formule Renault en 1972;
• Rallycross : champion d’Europe en 1977.

Photos : Renault